Chronique d’Edwige Laure Nguenya /
Contrairement à ce que beaucoup pensent, je crois que le plus malheureux c’est celui qui quitte son pays, sa terre natale. Car il vivra presque toujours avec ce regret, souvent silencieux et surtout inaudible.
Partir définitivement est peut être perçu comme la solution dans l’immédiat mais à long terme, les répercutions peuvent être destructrices.
Vous dites ne jamais recevoir de témoignage de ceux qui sont partis et le regrettent pourtant il y a pléthore de témoignages dans ce sens.
Certains partent pour un emploi, d’autres pour une famille, d’autres encore pour des raisons économiques et aussi politique, drame familiale. Mais tous ont en commun une certaine nostalgie du passé qui asphyxie presque jusqu’à l’étouffement.
Dans mon cas, c’est un drame familial qui m’a fait gagner l’extérieur avec l’idée que je ne remettrais plus jamais les pieds au Cameroun. J’étais très jeune et n’avais en tête aucune terre promise mais juste l’idée de me sauver ou disparaître à jamais. Peu importait ou j’allais, je n’avais alors que ces deux alternatives. J’avoue qu’il m’a fallu plusieurs années et l’aide de certaines personnes pour réparer les blessures. Et encore les plaies refusent toujours de se refermer. Bref, les circonstances de la vie ont fait que très jeune, je n’ai vu que cette solution là pour avoir envie de rester en vie.
Pourquoi ne pas rentrer alors ?
Ne pas rentrer peut donc se résumer parfois à un deuil impossible qui ne se met pas en place, bien qu’il ait une volonté insidieuse de franchir le pas.
Alors, on regrette de ne pas avoir suffisamment de culot pour le faire. On regrette d’avoir construit une autre vie loin de chez soi. On culpabilise de devoir contraindre ses propres enfants qui je le rappelle, sont d’une autre région que soi, car si cette région est notre région d’adoption, pour nos enfants, c’est leur lieu de naissance donc leur origine. Ils ont nos racines mais d’origine différente. On ne se sent pas la force de leurs imposer le déchirement qui nous rend presque schizophrène et empêche quasi systématiquement le bonheur. On se dit, c’est un choix que nous avions fait, c’est à nous de l’assumer, nous avons le devoir de préserver nos enfants pour qu’ils ne connaissent le même sort et on se bat de toute notre énergie pour leur offrir ce que nous n’avons pas su nous offrir à nous même.
Voilà quelques-unes des raisons pour laquelle nous restons, malgré tout.
Êtes-vous surs de vouloir vraiment faire un tel choix malgré nos mises en garde répétitives??? Je suis sure que non, mais certains n’acceptent pas le fait que l’on puisse influer sur notre propre destin une fois rentrer dans l’âge adulte. La balle est dans notre camps, c’est à nous d’en faire l’usage que nous voulons.
Mon conseil: On construit son paradis là où on veut, aucun lieu sur terre n’est un paradis et ne le devient que si nous décidons de le voir ainsi.
Moi, je n’ai pas encore construis mon paradis, c’est vous dire. 20 ans après être partie. Je suis certainement très nulle mais je pense n’avoir jamais baissé les bras et rêve toujours d’y parvenir. Mais je reste aussi convaincue que je l’aurais certainement déjà fait si je n’étais jamais partie.
Ailleurs ne vaut certainement pas le sacrifies de sa vie.
Si ça peut aider, c’est gratuit.
NEL
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